Avancement de ma fable
"Rien n’éxiste qui n’ait
au préalable été rêvé. "
Court-métrage
Rien n’éxiste qui n’ait au préalable été rêvé. Cette étrange phrase cachée entre les
pages d’un très controversé traité de féérie du moyen-âge a littéralement ensorcelé
mon imaginaire, littérairement attisé ma curiosité, pour m’emmener, au fil des
lectures, en quête du Pays Merveilleux. Aiguillé d’un livre à l’autre, avide de
savoir, j’ai trouvé sur mon chemin la poésie, la philosophie, la religion et
les sciences. J’ai découvert le romantisme allemand, le chamanisme sibérien et
le réalisme-merveilleux haïtien, rencontré Novalis, Bachelard et Hubert Reeves !
Et tous, à leur manière, ont essayé de m'ouvrir les portes du merveilleux, sans jamais
vraiment s’entendre sur les clefs à utiliser. C’est pourquoi dans ce court-métrage, par le biais de citations, je confronte toutes ces pensées si divergentes pour en tirer
la leçon de mon voyage initiatique vers le Pays Merveilleux, à la manière d’une
fable.
Voilà, j'ai écrit et lu/enregistré les dialogues de ma fable, constitués essentiellement de citations (à peine) arrangées. Je vais pas tout vous mettre, c'est long, mais je peux poster le début :
"-Où vas-tu, fils ?
-Dehors, père.
-Dehors ? Et que
comptes-tu y trouver, dehors ? Crois-moi, tout ce qu’il te faut est dans
ce terrier. Un toit, de la chaleur, de la nourriture et du travail pour
t’occuper l’esprit.
-Je veux voir de mes yeux le
Pays Merveilleux, père.
-Le Pays Merveilleux ?
Hum... Et qu’aurait-il donc d’après toi, ce pays, de si merveilleux qu’il
mériterait que l’on quitte son foyer pour lui ? Ne t’en soucie pas, ce
n’est que fable, et ton apétit de lui te passera, comme à moi.
-Mais... Entre les fables
des diverses mythologies, les contes de fées, les inventions de certains poètes
et le rêve qui se poursuit en moi, je perçois une parenté profonde. Leurs
images ont précisément cette faculté d’émouvoir mon rêve intérieur, de
l’appeller à la surface et de le projeter sur les choses qui m’environnent !
Le rêve, la poésie, le mythe, prennent pour moi figure d’avertissements et
m’invitent à ne me satisfaire ni de cette conscience de moi, qui suffit à mon
comportement social et moral auprès du reste du terrier, ni de cette
distinction entre moi et les objets, qui me fait croire que mes organes de
perception « normale » enregistrent l’exacte copie d’une « réalité ».
Je ressens une vérité derrière tout celà ! Ce que je vois n’est pas la
réalité, moi-même je ne sais pas qui je suis, et je trouverai des réponses à
ces questions au Pays Merveilleux !
-Hum... La jeunesse... Tu ne
sais pas encore, et te berce d’illusions... Mais fils écoute-moi : Il y
eut un paradis sur terre autrefois, où les êtres vivaient en totale harmonie,
tous inclus dans le Grand Tout. Le miracle de Dieu était partout. Mais
aujourd’hui, hélàs ! Elles sont enfuies, la foi conjuratrice, et celle qui
a le pouvoir d’universelle métamorphose, qui fonde la fraternité de tous les
êtres, l’imagination ! Enfuies... Et hostile, un vent glacé se leva du
nord sur les campagnes grellotantes et, saisi d’un froid mortel, le Pays
Merveilleux s’évanouit dans l’éther ! Il n’en reste plus rien aujourd’hui,
nous vivons dans un monde moderne et le merveilleux n’est plus que le mode
d’expression des sociétés primitives...
-Mais tu as le même regard
naïf que ces primitifs ! Tu ne te poses aucune question, et t’en tiens à
ce que tu crois voire ! Mais ce n’est ni moderne, ni scientifique ! Rien ne va de soit. Rien n’est donné. Tout est
construit ! Avant tout, il faut savoir poser des problèmes, car pour un
esprit scientifique dont tu te réclames, toute connaissance est une réponse à
une question, que tu ne poses pas. Tu considères comme acquis ce qu’on t’a
dit ! N’oublies pas que la connaissance commune est inconscience en
soit ! Doute de tout !
-Mais ouvre les yeux, notre
monde est rationnel, le merveilleux que tu recherches a disparu, il n’est plus,
c’est un fait.
- Il est si doux à la
paresse intellectuelle d’être cantonnée dans l’empirisme, d’appeller un fait un
fait et d’interdire la recherche d’une loi, la recherche d’un sens à tout
ça ! Ha ! Je ne veux pas te croire, ce serait trop facile ! n’écoutes
jamais la méthode des faits, pleine d’autorité et d’empire, qui s’arroge un air
de divinité qui tyrannise notre créance, et impose à notre raison. Un être qui
raisonne, démontre même, me considère en égal. Il me laisse la liberté du
jugement ; et ne me force que par ma propre raison. Celui qui crie voilà
un fait, me prend pour un esclave. Alors permets-moi encore d’en douter, et de
ne jamais me fier à ce qu’on appelle naïvement « les faits », ce
n’est que comme ça que j’accèderai à la vérité.
-Ecoute tes ainés, petit
arrogant, je suis ton père et j’ai l’expérience. Si je te dis que le Pays
Merveilleux est mort depuis longtemps c’est qu’il est mort depuis longtemps.
-L’âge n’est pas mieux
qualifié, à peine l’est-il autant, pour donner des leçons, que la jeunesse, car
il n’a pas autant profité qu’il a perdu !
-Impertinent ! Je ne
suis pas sénile, je suis resté jeune et alerte dans ma tête, je sais ce que je
dis !
-Aah... mais quand il se
présente à la culture scientifique l’esprit n’est jamais jeune, père. Il est
même très vieux, car il a l’âge de ses préjugés ! À présent je m’en vais trouver le Pays
Merveilleux, et ne reviendrai que transformé, ou ne reviendrai pas.
Adieu !
"
J'espère juste que ce n'est pas trop tiré par les cheveux du fait que ce soit constitué de citations, c'est peut-être un peu dense aussi, enfin... J'ai essayé de le lire, ça passe plutôt bien. Pour l'instant je galère à mettre les enregistrements en ligne, et il est tard, alors à une autre fois!
Vincent.